La crise qui secoue actuellement le royaume baoulé figure parmi les principaux sujets abordés par Venance Konan, dans son éditorial «réflexions éparses». Accusée d’un possible soutien au pouvoir en place, la reine mère a été destituée au profit de son fils.
Venance Konan n’est pas allé par quatre chemins pour dénoncer la procédure de destitution de la reine mère du royaume Baoulé le mois dernier. Si des voix officielles jugent tout à fait légitime l’intronisation de son fils, mettant ainsi une fin au règne de la mère, la succession de la reine serait pour d’autres liés à des raisons politiques.
Après le divorce entre le RHDP et le PDCI RDA, la chefferie baoulé a tenté de prendre ses distances avec le régime en place, en raison du soutien voué au président Henri Konan Bédié. Mais tous les cadres du royaume Akan n’ont pas décidé de jurer fidélité au sphinx de Daoukro. A en croire les partisans du parti unifié, la reine mère aurait été destituée pour la simple raison qu’elle aurait décidé de soutenir le régime du RHDP, une hypothèse niée en bloc par plusieurs notables du royaume Akan.
Certains notables sont même allés jusqu’à affirmer qu’une femme n’avait pas le droit de s’asseoir sur le trône dans le royaume Baoulé, une affirmation que le journaliste Venance Konan a remis en cause dans son éditorial «réflexions éparses» paru dans le quotidien Fraternité Matin. Pour se justifier, le DG du quotidien gouvernemental a d’abord fait un petit rappel historique sur le parcours du royaume Akan depuis le Ghana jusqu’en Côte d’Ivoire :
«Tous les »sachants » ou prétendus »sachants » se sont prononcés sur la question. Il y a bien entendu, ceux qui soutiennent la reine et ceux qui soutiennent le fils.
Parmi les arguments contre la reine, il y’ a le fait qu’elle est une femme et, l’on soutient qu’au royaume Baoulé, une femme ne saurait occuper le trône, que la transmission du pouvoir se fait d’oncle à neveu et non de frère à sœur, la reine actuelle étant la sœur du précédent roi, qu’elle serait chrétienne et refuserait d’accomplir certains rites qui heurteraient ses convictions religieuses, que le royaume Ashanti au Ghana aurait fait injonction au royaume Baoulé de mettre de l’ordre dans ses affaires en installant un homme sur le trône à la place de la femme…
Faisons un peu d’histoire. Il y a quatre siècles, il y eut une querelle de succession au trône au sein du royaume Ashanti qui se trouve au Ghana actuel. Le clan qui perdit prit la fuite sous la conduite d’une femme dénommée Abla Pokou. Lorsqu’ils arrivèrent au bord du fleuve Comoé, cette femme dut sacrifier son unique fils aux esprits des eaux pour que tout le groupe puisse passer.
Parvenu sur l’autre rive, ce groupe se donna le nom Baoulé en souvenir de ce sacrifice. Puis, le groupe s’installa dans le centre de la Côte d’Ivoire d’aujourd’hui et devint un puissant royaume dirigé par Abla Pokou».
Dans son cours d’histoire, Venane Konan met un point d’honneur à préciser que la reine Abla Pokou a été succédée par sa sœur après sa mort, balayant ainsi la théorie selon laquelle la femme ne peut s’asseoir sur le trône dans le royaume Baoulé :
«A sa mort, sa soeur lui succéda et régna une trentaine d’années. Quand a-t-iété décidé qu’au royaume Baoulé, une femme ne devait plus s’asseoir sur le trône ? Il y a, pourtant, aujourd’hui, de nombreuses femmes qui dirigent des villages en pays Baoulé. Depuis quand le royaume Baoulé est-il devenu un royaume vassal du royaume Ashanti pour que ce dernier dicte aux Baoulé ce qu’ils doivent faire ?», s’interroge le journaliste ivoirien.
Pour Venance Konan, il est clair que la reine mère du royaume baoulé, récemment destituée au profit de son fils, avait parfaitement le droit de prétendre au trône, malgré son statut de femme : «Elle a été intronisée reine, il y a déjà quatre ans, devant les plus hautes autorités de ce pays. C’est seulement maintenant que l’on remarque qu’elle est une femme ? S’est-elle imposée toute seule à la tête du royaume ? Non ! Elle a été désignée par les instances chargées de le faire. Personne n’avait, jusqu’à présent, protesté. Depuis quatre ans. Pourquoi le fait-on maintenant?».
Le patron de Fraternité Matin conclue son éditorial sur le royaume baoulé par une interrogation sur l’immiscion du politique dans la succession qui a été récemment opérée : «La politique politicienne se serait-elle introduite dans l’affaire?». La question reste en tout cas posée.
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