La modification de la Constitution ivoirienne adoptée il y’a seulement trois ans a été confirmée par le président Ouattara Alassane. Bien avant que le chronogramme de cette révision ne soit connu, le député Alain Lobognon, aujourd’hui membre de l’opposition parlementaire, annonce d’ores et déjà qu’il votera contre ce projet.
Alain Lobognon n’a pas tardé à donner son opinion sur la modification de la Constitution ivoirienne annoncée par Ouattara. A la veille de la fête d’indépendance de la Côte d’Ivoire, le président ivoirien a indiqué dans une interview que l’actuelle législation du pays, la troisième de son histoire, sera révisée. Mais nul ne sait pour l’instant sur quoi portera cette modification de la Constitution ivoirienne. Malgré l’assurance que la révision n’empêchera aucune candidature en 2020, Alain Lobognon annonce d’ores et déjà qu’il combattra ce nouveau projet du pouvoir en place.
Transfuge du RDR, il a posé ses valises récemment au MVCI, un mouvement de soutien à Guillaume Soro, l’ancien président de l’Assemblée Nationale. Après s’être opposé à la réforme de la commission électorale proposée par le gouvernement, le député de la circonscription de Fresco a fait savoir ce mercredi qu’il votera non au projet de modification de la Constitution ivoirienne. Selon les dispositions de l’article 177 de la nouvelle législation ivoirienne, le président Ouattara a en effet le pouvoir de réviser les lois fondamentales du pays. Et le chemin pour cette révision semble encore long. Le texte doit d’abord être déposé devant les deux Chambres du parlement, à savoir l’Assemblée Nationale et le Sénat. Une fois adoptée par les deux chambres, le projet devra par la suite être soumis aux ivoiriens par vote référendaire avant d’être véritablement adopté, selon les dispositions de l’article 177 :
«L’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au Président de la République et aux membres du Parlement. Le projet ou la proposition de loi portant révision de la Constitution est déposé simultanément devant les deux chambres du Parlement. Pour être pris en considération, le projet ou la proposition de révision doit être voté à la majorité absolue des membres du Congrès. La révision de la Constitution n’est définitive qu’après avoir été approuvée par référendum à la majorité absolue des suffrages exprimés. Toutefois, le projet ou la proposition de révision n’est pas présenté au référendum lorsque le Président de la République décide de le soumettre au Parlement. Dans ce cas, le projet ou la proposition de révision n’est adopté que s’il réunit la majorité des deux tiers des membres du Congrès effectivement en fonction. Le texte portant révision constitutionnelle, approuvé par référendum ou par voie parlementaire, est promulgué par le Président de la République et publié au Journal officiel de la République de Côte d’Ivoire».
Outre Alain Lobognon qui a déjà affiché sa position sur la révision constitutionnelle en Côte d’Ivoire, d’autres élus de l’opposition ne tarderont pas à lui emboiter le pas, surtout que le régime est soupçonné de vouloir modifier les lois fondamentales du pays pour servir ses propres intérêts.
Alain Lobognon justifie son opposition à la révision constitutionnelle
«Je voterai NON à une modification constitutionnelle…
Dans ma vie politique, j’ai connu et vécu trois périodes de l’histoire tumultueuse des Changements Constitutionnels en Côte d’Ivoire.
Les deux premières fois, j’avais dénoncé des intentions inavoués des hommes forts au pouvoir d’écarter de la course au pouvoir, un adversaire gênant. Alassane Ouattara était le choix d’une partie de la classe politique et d’une partie du Peuple, qui rêvaient d’élections justes et démocratiques en Côte d’Ivoire pour porter sur lui leurs voix. Au sein du Gouvernement, l’on ne voyait pas les choses sous cet angle. Et malgré les moyens légaux utilisés pour modifier la Constitution ivoirienne, je n’avais point renoncé à incarner l’une des voix publiques qui dénonçaient une Constitution taillée sur mesure pour écarter un adversaire que l’on refusait de croiser à la régulière, par crainte de perdre le pouvoir d’Etat.
Ainsi en 1998, lorsque plusieurs articles de la Constitution de 1960 fut modifiée par une large majorité de l’Assemblée, mon parti d’alors, le RDR fut le premier à crier au tripatouillage constitutionnel. Première période.
En juillet 2000, malgré un appel officiel du RDR à voter OUI au référendum Constitutionnel, c’est encore au sein du RDR, que nous dénoncions le plus une Loi taillée sur mesure pour empêcher notre champion à devenir Président en Côte d’Ivoire. Deuxième période.
C’est conscient de tous les drames nés de nos colères à cause des manipulations constitutionnelles, que membre du Gouvernement en février 2014, j’ai ouvertement exprimé mon opposition à toute modification de l’article 35 de la Constitution. Je l’avais fait au nom et pour la mémoire de ces vies innocentes brutalement perdues à cause de la Constitution. Nombreux sont ceux qui avaient été séduits par mon argumentaire. Je tiens à leur faire un clin d’œil. Ils se reconnaîtront.
C’est encore au nom d’intentions inavoués qu’en octobre 2016, je me suis abstenu de soutenir le projet de Constitution de la Troisième République en Côte d’Ivoire. J’avais relevé plusieurs points dont l’adoption prouve aujourd’hui ce recul démocratique que les défenseurs d’une modification en 2019, avaient balayé de la main. Même l’introduction d’une simple virgule fut impossible en octobre 2016. Troisième période.
Je ne regrette pas aujourd’hui d’avoir dit NON à cette Constitution que le Président de la République, à la veille du 59ème anniversaire des festivités de notre accession à l’Indépendance, entend modifier.
En tant qu’élu de la Nation, je voterai NON à toute modification de notre Constitution, qui en 2016, a été présentée par certains juristes et constitutionnalistes comme la plus moderne et achevée jamais instituée dans un pays démocratique.
Je voterai NON à toute modification de la Constitution de 2016 à l’instar de la majorité des Députés de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire.
Une nouvelle Constitution, la Côte d’Ivoire en aura besoin après la défaite électorale du Rhdp en 2020. Et cette Constitution sera une Constitution consensuelle qui sera appelée à survivre au temps et aux générations citoyennes qui se succèderont dans la future Nation ivoirienne. C’est ce que m’inspire ce 59ème anniversaire de l’Indépendance de notre pays.
Pensées émues pour ces soldats de la République, qui répondant aux consignes des institutions incarnant la République, croulent ce 7 Août 2019, derrière les barreaux des prisons. J’avais tant rêvé les voir enfin libres. Que le Seigneur les assiste!
Alain LOBOGNON,
Député de la Nation,
Vice-président du MVCI».
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