Les réactions se multiplient suite à la condamnation de Jacques Mangoua, le vice-président du PDCI RDA, pour détention illégale de munitions d’armes de guerre. Le président du conseil régional du Gbeke a été condamné ce jeudi à cinq ans de prison par le tribunal de première instance de Bouaké, un verdict que la justice aurait rendu précipitamment selon Tiémoko Assalé, le maire de la comme de Tiassalé. Rappelant que le prévenu avait été emprisonné une première fois en 2008, le patron du quotidien l’Eléphant déchainé a indiqué que la justice aurait dû mener une enquête minutieuse avant de prononcer une sanction aussi lourde à l’endroit d’un élu de la nation.
Notre justice fait honneur.
Ainsi donc, en deux temps trois arrogance, notre service public de la justice, a, en quasiment 72 heures, arrêté, écroué, jugé et condamné à 5 ans de prison ferme, le président du Conseil régional du Gbeke, Jacques Mangoua, pour « détention » illégale d’armes de guerre » et autres infractions.
Que faut-il dire après un tel procès? Je n’ai pas vocation à me prononcer sur le fond du dossier parce que je ne le connais pas.
Je voudrais juste, comme je l’ai toujours fait dans ce pays, élever quelques remarques républicaines.
L’Etat de droit suppose l’absence de l’arbitraire. Il suppose aussi le traitement de tous les citoyens, de façon égalitaire devant la loi. Il suppose encore l’absence de privation de liberté-par respect au principe constitutionnel de la présomption d’innocence pour une personne-tant que la preuve de sa culpabilité, à la suite d’un procès équitable dans lequel tous ses droits ont été respectés, n’a pas été rapportée.
Le président Mangoua Jacques a été lourdement condamné, ce qui suppose que le procureur a pu établir un lien direct et non supposé, entre la présence des armes en question à son domicile et sa personne. Et c’est ce qui, sans doute, aurait justifié le choix de la procédure de flagrant délit.
Or le flagrant délit suppose que l’auteur supposé de l’infraction alléguée ait été pris sur les faits, au moment même de la commission de l’infraction ou que, ayant commis l’infraction, il ait été débusqué par la clameur publique dans un temps très voisin de l’instant de cette commission.
Dans cette affaire, telle ne semble pas être le cas. Et c’est à ce niveau que je voudrais dire un mot.
Il faut que notre service public de la justice arrête de se livrer en spectacle. Cette affaire d’armes de guerre découverte dans un domicile privé, non pas par les forces de l’ordre à la suite d’une investigation, mais dans des conditions rocambolesques, devrait appeler de la part du parquet de Bouake, à plus de modestie, de circonspection et de professionnalisme.
Et au lieu de retenir le flagrant délit pour faire du buzz et impressionner on ne sait qui, il aurait dû ouvrir une enquête sérieuse, investiguer pour comprendre l’environnement qui a présidé à l’arrivée de ces armes dans ce domicile. Et cela pouvait se faire en toute sérénité, sans condamner en 72 heures, un homme d’affaire qui emploie des centaines d’Ivoiriens, qui est le président élu d’un conseil régional et qui, par conséquent, offre toutes les garanties de représentation…et qu’on pouvait à tous moments avoir sous mains de justice.
Mais voilà, je ne suis pas le juge qui a prononcé la peine, ni le procureur qui, aux pas de course et uniquement à charge, a mené l’affaire. Sans doute pensent-ils avoir fait en toute honnêteté leur travail et qu’ils ont débarrassé la république, d’un dangereux criminel. Bravo et merci.
Merci de nous avoir permis de réaliser que notre justice est capable de faire preuve d’une célérité qui fait presqu’envie, dans certains dossiers.
Dans un environnement politique et social pourri où tous devrions avoir à l’esprit avant de poser chaque acte que l’arbitraire est le carburant qui alimente la fracture sociale, ils ont réussi à placer une affaire sérieuse et un verdict judiciaire, sous le joug du soupçon qui fait crier le peuple, dechaine des passions et fait perdre confiance dans la justice.
Mangoua Jacques retourne donc pour la deuxième fois en prison, cette fois-ci, sous le statut de « condamné « .
En 2008, alors qu’il était le président du Conseil général de Beoumi, le parquet d’Abidjan s’était arrangé pour l’embarquer dans l’affaire des vols monstrueux dans la filière café-cacao et l’avait embastillé à la Maca. Alors qu’il n’avait strictement rien à avoir dans cette affaire, car ne gérant aucune structure de la filière café-cacao. Il m’avait trouvé dans cette prison et avait occupé, pendant quelques mois, une cellule située en face de la mienne, au bâtiment dit des « Assimilés ». Avant d’être libéré quelques mois plus tard.
Le voilà de nouveau dans les griffes de notre justice qui nous fait honneur sous l’ombre du soupçon.
Assale Tiemoko Antoine
Journaliste indépendant.
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