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Levée de l’immunité parlementaire : les députés de l’opposition derrière Guillaume Soro

La levée de l’immunité parlementaire de Guillaume Soro et cinq autres députés issus de son groupe au parlement, suscite une vive polémique en Côte d’Ivoire. Les élus de l’opposition qui se sont réunis dans la journée du mercredi ont dénoncé cette mesure, avant d’appeler à la suspension de l’arrêté pris par le bureau de l’Assemblée Nationale de Côte d’Ivoire il y’a quelques jours.

La levée de l’immunité parlementaire de Guillaume Soro change la donne pour l’ancien chef du parlement ivoirien. Visé par un mandat d’arrêt international depuis un mois environ, le président d mouvement politique GPS n’est plus à l’abri d’une extradition désormais, avec l’arrêté pris par l’actuel bureau du parlement ivoirien. Outre Guillaume Soro, cinq autres députés issus du groupe parlementaire Rassemblement, ont perdu leur immunité de député, suites aux graves accusations dont ils font l’objet.

Déjà incarcérés dans plusieurs prisons du pays, ces proches de Guillaume Soro risquent désormais une condamnation à plusieurs années de prison après la levée de leur immunité parlementaire il y’a quelques jours. En ce qui concerne le président du GPS, candidat déclaré à la présidentielle d’octobre 2020, l’arrêté pris par le bureau de l’Assemblée Nationale l’expose à une extradition dans son pays, en vue de répondre devant la justice des graves accusations de déstabilisation portées à son encontre.

Outre les accusations de détournements et de blanchiment d’argent, Guillaume Soro est aussi poursuivi pour atteinte à l’autorité de l’Etat et à l’intégrité du territoire national. A l’instar du parti de l’ancien chef du parlement ivoirien, l’opposition parlementaire ivoirienne a dénoncé cette mesure prise par le bureau de l’Assemblée Nationale.

Pour les députés de l’opposition, aucun texte ni loi du parlement n’autorise le bureau de l’Assemblée à procéder à la levée de l’immunité parlementaire d’un député.

Après avoir dénoncé cette mesure, l’opposition a demandé la suspension de cette mesure prise à l’endroit des députés pro-Soro interpellés le mois dernier, lors de la journée très mouvementée du retour de Guillaume Soro en Côte d’Ivoire, retour qui n’aura finalement plus lieu après le déroutement de l’avion de l’ex-chef du parlement ivoirien vers une destination autre que son pays.

Communiqué de l’opposition parlementaire dans l’affaire Soro

«Conférence de presse de l’opposition parlementaire ivoirienne suite à la levée de l’immunité parlementaire de six (06) honorables députés

Propos liminaires

Le retour annoncé de l’honorable SORO Kigbafori Guillaume, Député de Ferkessedougou Commune, Ancien Président de l’Assemblée nationale, Président de Générations et Peuples Solidaires, GPS, avait mobilisé le 23 décembre 2019, des sympathisants et militants et des responsables de partis et mouvements politiques proches de GPS au Siège de ce Mouvement.

Plusieurs citoyens dont cinq (05) Députés, en fonction et en session, ont été interpellés en ces lieux à la suite d’une conférence de presse qui s’y tenait.

Le Procureur de la République, M. ADOU Richard indiquait, au cours d’une intervention télévisée, ce même jour, que cette interpellation, en flagrant délit, portait sur des troubles à l’ordre public, la divulgation de fausses nouvelles et une tentative d’atteinte à l’autorité de l’état.

Interpellés par l’arrestation de leurs collègues, les honorables Députés :

– LOBOGNON AGNIMA ALAIN MICHEL, Député de Dahiri, Fresco et Gbagbam Commune et Sous-Préfecture, ancien Ministre ;

– SORO KANIGUI MAMADOU, Député de Kanoroba, Nafoun, Sirasso Commune et Sous-Préfecture ;

– YAO SOUMAÏLA, Député de Kokomian, Tankessé, Tienkoikro commune et Sous-Préfecture ;

– CAMARA LOUKIMANE, Député de Bouko et Bouna Commune et Sous-Préfecture ;
– SOUMAHORO KANDO, Député de Biankouma, Blapleu, Kpata et Santa Commune et Sous-Préfecture.

Les Groupes Parlementaires PDCI-RDA, Vox Populi et Rassemblement, ont automatiquement saisi par courrier, N°réf : 014 /GP/PDCI-VOX-RASS, daté du 26 décembre 2019, le Président de l’Assemblée nationale de Côte d’Ivoire d’une demande de suspension des poursuites et de la détention des cinq (05) Députés suscités.

Par ailleurs lors de la Cérémonie de clôture de la Session ordinaire 2019 de l’Assemblée nationale, le 27 décembre dernier, le Professeur Maurice Kacou GUIKAHUE, Président du Groupe Parlementaire PDCI-RDA, intervenant au nom de l’opposition parlementaire, a demandé que la situation des Députés incarcérés, depuis le 23 décembre 2019, soit inscrite à l’ordre du jour de la séance.

Devant toute l’Assemblée réunie en plénière, en présence, de SEM M. le Vice-Président de la République, des membres du Corps Diplomatique, des membres du gouvernement et de la Presse, Monsieur Amadou Soumahoro, Président de l’Assemblée nationale, a répondu qu’il venait à peine d’être informé par le Secrétaire Général de l’institution de l’existence de ce courrier et qu’il y donnerait de manière diligente une suite en respectant les textes en vigueur.
Nous restions donc dans l’attente de cette suite lorsqu’à travers un communiqué émanant du Bureau de l’Assemblée nationale, l’arrêté N°001-2020/AN/B portant levée de l’immunité parlementaire de nos collègues Députés incarcérés et de l’honorable SORO KIGBAFORI GUILLAUME, Député de Ferkessédougou Commune, ancien Président de l’Assemblée nationale, ancien Premier Ministre a été porté à la connaissance du grand public le lundi 20 janvier 2020.
Selon les termes dudit communiqué, cet arrêté fait suite à une décision de saisine du Bureau de l’Assemblée nationale, par le groupe parlementaire RHDP.

La surprise et l’émoi qui se sont emparées des ivoiriens en général et de l’opposition parlementaire en particulier, à la suite de ce communiqué du Bureau de l’Assemblée nationale, nous obligent, en tant que Groupes Parlementaires de l’opposition à vous livrer notre appréciation de la situation au regard des textes en vigueur dans notre pays et de l’environnement socio-politique de plus en plus délétère.

I- De la violation de la Constitution ivoirienne du 08 novembre 2016 et de la résolution N° 005 A du 27 juillet 2018 portant Règlement de l’Assemblée nationale.

L’arrêté du Bureau de l’Assemblée nationale portant levée de l’immunité parlementaire de six (06) Députés a visé la Constitution ivoirienne et le Règlement de l’Assemblée nationale alors qu’aucune disposition de ces lois ne permet d’agir comme l’a fait le Groupe Parlementaire RHDP.

L’immunité parlementaire des Députés ivoiriens est traitée par les articles 45 à 49 du Règlement de l’Assemblée nationale.
Au regard des faits que nous avons décrits plus haut, le Président de notre Chambre parlementaire avait le devoir de se soumettre aux dispositions de l’article 47-3 dudit Règlement en procédant à la mise en place d’’une Commission Spéciale pour l’examen du dossier.

En effet, l’article 47 alinéa 3 indique que : « Saisie d’une demande de suspension de la poursuite ou de la détention d’un Député détenu ou arrêté, l’Assemblée nationale peut ne décider que la suspension de la détention ou de tout ou partie des mesures en cause, seuls sont recevables les amendements présentés à cette fin. »

Le Président de cette institution productrice de lois a donc choisi délibérément d’ignorer cet acte important posé par l’opposition parlementaire et a décidé de se créer une procédure illégale, méconnue et dangereuse qui a consisté à recevoir une demande de levée de l’immunité parlementaire de six (06) Députés, formulée par le groupe parlementaire RHDP.

Ce faisant, Monsieur Amadou Soumahoro a méconnu le préambule de la Constitution ivoirienne du 08 novembre 2016 et s’est rendu coupable de violation flagrante de son article 92 tout comme de l’article 47 du Règlement de l’Assemblée nationale.

– De la compétence relative à l’introduction d’une demande de levée de l’immunité.
L’arrêté du Bureau de l’Assemblée nationale indique que le groupe parlementaire RHDP a introduit une demande de levée de l’immunité parlementaire de six députés. Au regard des dispositions des articles du règlement régissant l’immunité parlementaire, seul le parquet, autorité de poursuite judiciaire, peut demander l’autorisation de poursuite ou d’arrêter un parlementaire. Les Députés y répondent par la levée ou non de l’immunité des supposés mis en causes dans des affaires criminelles. C’est en somme une prérogative exclusive du parquet dans un intérêt de poursuite.

Aucun parlementaire, aucun groupe parlementaire ne peut demander la levée de l’immunité parlementaire d’un autre, la demande introduite par le RHDP est par conséquence illégale et à considérer comme n’ayant jamais existée.

– De l’illégalité et de l’illégitime du Bureau actuel de l’Assemblée nationale.
Le Bureau actuel de l’Assemblée nationale, jusqu’à preuve contraire, n’a été pas été régulièrement composé. Trois membres du projet de bureau annoncé ont démissionné par courrier et jusqu’à cet instant aucun Journal Officiel n’a publié d’acte officiel portant Bureau de l’Assemblée nationale comme indiqué dans l’article 9 du Règlement.
D’où sort donc ce Bureau illégal qui s’arroge des pouvoirs extraordinaires pour lever l’immunité de Député ivoirien arrêté en pleine session ordinaire.

La levée de l’immunité pour des faits intervenus lors d’une session ordinaire échappe totalement au Bureau de l’institution et requiert 2/3 des Députés pour donner force de loi à un tel acte.
Le Bureau actuel de l’Assemblée nationale même s’il avait été légalement constitué n’a pas compétence pour se prononcer sur la levée de l’immunité parlementaire de Députés arrêtés en session ordinaire.

II- Des manœuvres illégales du Bureau et du Président de l’Assemblée nationale
Toutes les personnes qui suivent cette affaire savent que le Procureur de la République dit avoir arrêté les Députés mis en cause en flagrant délit. Dès cet instant, point n’est besoin pour lui de demander une autorisation d’arrêter pour aboutir à une levée de l’immunité de ces derniers.

Où est donc l’intérêt du Bureau de lever l’immunité de Députés en détention depuis un mois ?

A quoi sert cet arrêté puisque l’autorité de poursuite n’en a pas besoin et l’Assemblée nationale ne peut rien en tirer ?

Comment le Peuple de Côte d’Ivoire et la Communauté internationale pourraient comprendre ou interpréter ces actes qui entachent gravement la paix et la réconciliation des ivoiriens ?

Le Bureau actuel de l’institution est composé uniquement de Députés du Groupe Parlementaire RHDP. Le Président de l’institution a choisi comme dénoncé depuis près d’un an de violer de façon répétée et systématique la Constitution qui énonce dans un paragraphe de son préambule :

« Nous, peuple de Côte d’Ivoire…………… instruit des leçons de notre histoire politique et constitutionnelle, désireux de bâtir une nation fraternelle, unie, solidaire, pacifique et prospère et soucieux de préserver la stabilité politique……………. Approuvons librement et solennellement devant la nation et l’humanité la présente Constitution comme loi fondamentale dont le préambule fait partie intégrante »

III- De l’Appel des Groupes parlementaires PDCI-RDA, Vox Populi et Rassemblement.
Les Groupes parlementaires de l’opposition fermement attachés au respect des lois, que nous nous sommes librement données, font noter que l’arrêté portant levée de l’immunité parlementaire des six Députés est nul par ce que mal fondé et illégal.

Chaque citoyen de notre pays comprend aisément que toutes les violations graves des droits et libertés que nous constatons et dénonçons, visent un dessein bien perceptible consistant à museler l’opposition parlementaire pour réussir un passage en force de la modification constitutionnelle annoncée il y’a peu de temps par le Président de la République, par ailleurs Président du RHDP.

C’est le lieu d’appeler la conscience nationale et internationale à un éveil plus accru pour garantir les chances d’une stabilité durable pour notre pays face à tous les dérapages juridico-politiques que nous subissons tous.
Les Groupes Parlementaires PDCI-RDA, VOX POPULI et RASSEMBLEMENT exigent donc la suspension des poursuites engagées contre les députés de l’opposition et demandent la suspension immédiate de leurs détentions.

​​​​​​​Fait à Abidjan, le 22 janvier 2020

Les Groupes parlementaires PDCI-RDA, Vox-Populi et Rassemblement».

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