Le projet de logements sociaux pour les enseignants en Côte d’Ivoire est une annonce forte que la Cosefci n’a visiblement pas bien accueillie. L’année dernière, la coalition avait tenu tête au ministère de l’éducation nationale en déclenchant une série de grève dans l’enseignement primaire et secondaire public. Après plusieurs semaines de tensions, les enseignants ont finalement accepté de reprendre les cours et sauver une année scolaire bien déjà fragilisée par de nombreux arrêts de travail.
Doter les enseignants de logements sociaux en Côte d’Ivoire est-elle la meilleure alternative aux revendications du corps de l’enseignements ? C’est en tout cas l’avis partagé par la ministre de l’éducation nationale Kandia Camara il y’a plus d’un mois.
L’année dernière, la Cosefci avait engagé un bras de fer avec le ministère de l’éducation nationale, pour la prise en compte de plusieurs revendications dont la revalorisation de la prime de logement accordée aux enseignants. Pour faire face à cette revendication, Kandia Camara a suggéré cette année un projet immobilier spécialement destiné aux enseignants du primaire et du secondaire. Objectif, en finir définitivement avec la question des revendications sur le logement.
Mais cette solution proposée par Kandia Camara suscite très peu l’intérêt de la Cosefci. L’organisation syndicale qui avait annoncé une grève en janvier 2020, maintient son mot d’ordre, malgré le projet de logements sociaux présenté par Kandia Camara cette année. L’instance syndicale a appelé les enseignants à entrer en grève à compter du 28 janvier, et ce jusqu’au 30 du mois en cours.
Objectif de cette grève, inviter le gouvernement à prendre en compte toutes les revendications égrenées l’année dernière au gouvernement. Si le projet immobilier de Kandia Camara devrait en théorie mettre un terme aux revendications sur la revalorisation de la prime de logements, il convient de rappeler que la coalition d’enseignants avait adressé plusieurs revendications au ministère et au gouvernement.
En plus de la question du logement soulevée par les enseignants, les revendications de l’association syndicale tournent principalement autour de la suppression des cours de mercredi, le paiement des pécules (500 000F) dûs à chaque ex-enseignant contractuel, la suppression du grade d’instituteur adjoint…
La Cosefci appelle à une grève de trois jours
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Les enseignants de Côte d’Ivoire, depuis NOVEMBRE 2018, ont entamé la lutte autour de 5 points de revendications :
– La revalorisation des indemnités de logement devenues caduques compte tenu de la réalité du loyer dont le coût flambe à taux exponentiel en Côte d’Ivoire ;
– La suppression de la réforme incompréhensible et peu convaincante portant cours du mercredi
– Le relèvement au double de toutes les primes liées aux examens et l’assainissement des conditions de paiement pour verser très rapidement lesdites primes aux ayants-droit (je rappelle que nous attendons toujours en janvier 2020 celles des examens de juin-juillet 2019 alors que les droits d’examen sont payés depuis la rentrée scolaire 2018-2019)
– Le paiement des pécules (500 000F) dûs à chaque ex-enseignant contractuel et la réintégration du résiduel de ceux d’entre eux radiés pour fait de grève (alors qu’ils n’étaient pas encore fonctionnaires).
– La suppression pure et simple de l’emploi l’instituteur adjoint (quand on sait ce que vaut notre BEPC actuellement et que ces instituteurs adjoints font le même travail des instituteurs ordinaires).
Malgré toutes les brimades (calomnies, menaces, intimidations, ponctions et suspensions de salaires, gel des comptes bancaires, violences et voies de fait, destructions de biens, arrestations arbitraires et emprisonnements expéditifs), la mobilisation exemplaire et la bravoure au combat des enseignants, tous ordres confondus, ont contraint l’Etat à ouvrir un cadre de négociations plus ou moins acceptable. Le premier palier de ces négociations nous a ainsi conduits à des ateliers à Grand-Bassam, puis au CNMS à Cocody. Les conclusions de ces travaux ont été déposées sur la table du Premier Ministre qui avait promis devant toute la Nation et l’opinion internationale de nous recevoir « incessamment » pour ouvrir le second palier desdites négociations.
Avec l’intervention des différents médiateurs, des chefs traditionnels et des organisations de parents d’élèves, et pour sauver l’année scolaire (car nous aimons aussi notre pays contrairement à ceux qui nous prêtent à tort des relents politiques, foutaises !), nous avons suspendu notre mot d’ordre de grève, rattrapé les cours et participé activement aux examens à grands tirages. Et l’année scolaire fut sauvée. Il faut noter que l’impact de cette longue grève fut tel qu’il obligea le Ministère de l’Education Nationale, de l’Enseignement Technique et de la Formation Professionnelle à réorganiser tout le calendrier scolaire.
Cependant, notre bonne foi semble avoir été considérée comme une erreur puisque depuis 9 mois nous attendons toujours que la Primature nous reçoive « incessamment » pour donner des réponses concrètes à nos 5 points de revendications. Contre toute attente, notre ministère de tutelle nous sort un « projet immobilier » aux contours aussi loufoques que suspectes jusqu’à ce qu’eux-mêmes finissent par nous avouer ce que nous suspections depuis : la réponse selon eux à nos légitimes revendications dont la pertinence ne souffre d’aucune tâche (eux-mêmes l’ont reconnu) serait leur « projet immobilier ».
Face au dilatoire qui continue, face à cette politique du pourrissement, à cette manière de ruser et de nous infantiliser, nous n’avons d’autre choix que d’aller à la lutte. Nous avons entrepris une tournée à l’intérieur du pays du 11 au 20 novembre 2019, tenu une Assemblée Générale extraordinaire le 07 décembre 2019 et une tournée dans le District d’Abidjan. Le même discours sur toutes les lèvres : IL NOUS FAUT REPRENDRE LA LUTTE.
NOUS PARTONS DONC EN GRÈVE LES MARDI 28, MERCREDI 29 ET JEUDI 30 JANVIER 2019.
Ce « projet immobilier » qu’on nous présente et dont nous doutons fort de la mise en oeuvre ne saurait en aucun cas être la réponse à nos 5 points de revendications. Les enseignants de Côte d’Ivoire n’ont pas vécu toutes ces épreuves difficiles pour un quelconque projet immobilier ; il leur suffirait de s’organiser eux-mêmes pour mettre en place leur propre projet. Nous sommes nous-mêmes suffisamment intelligents pour le faire.
Par ailleurs, nous continuons de nous poser des questions sur ledit projet :
– Pour un total estimé de 110 000 enseignants fonctionnaires du préscolaire, du primaire et du secondaire général et technique (108 878 au cours de l’année scolaire 2018-2019 selon les statistiques « POCHE DSPS »), le MENET-FP « offrirait » 90 000 logements. Qu’en est-il des 20 000 enseignants fonctionnaires restants ?
– L’Etat ivoirien peut-il prendre ici l’engagement « d’offrir » désormais un logement à tout enseignant qu’il recrute ?
– Comment se fera le financement d’un tel projet (sans apport initial nous dit-on) ? Pitié pour nos salaires déjà largement en souffrance.
– On dit qu’on nous promet des maisons de 30 millions (valeur réelle ? ) à seulement 15 millions de nos francs (mon DIEU, quelle générosité ! ). Ici, ou bien les opérateurs économiques partenaires acceptent de nous faire ce cadeau du siècle (en êtes-vous sûrs mesdames et messieurs ? ). Ou bien l’Etat ivoirien accepte de subventionner (15 millions X 90 000 ; Seigneur, je me perds dans les calculs !!! ) soit directement, soit par exonération fiscale. MAIS ALORS, POURQUOI NE PAS TOUT SIMPLEMENT AUGMENTER NOS INDEMNITÉS DE LOGEMENT POUR QUE CHACUN DE NOUS PUISSE SE BÂTIR UNE MAISON À SA CONVENANCE, À SON GOÛT, OÙ ET QUAND IL LE SOUHAITE ? Ou bien, sommes-nous suffisamment inconscients ou moins intelligents pour le faire ?
– Allons-nous nous déplacer avec ces maisons lors des mutations ?
– L’offre en logements n’excèdant pas les 3000 logements pour un besoin annuel de 40 000 selon le Ministère de la Construction, du Logement et de l’Urbanisme ; ce qui expliquerait l’échec du Programme Gouvernemental de logements sociaux lancé depuis 2012 (sur 150 000 logements attendus, seulement 12 000 disponibles en 8 ans officiellement). Nous nous demandons comment notre ministère compte « offrir » ses 90 000 logements aux enseignants qu’il aime tant. On nous parle d’opérateurs internationaux (let’s wait and see s’ils sont aussi philanthropes ! ).
– Dans l’éventualité très douteuse que ce projet se réalise, qu’en sera-t-il pour la suite ? On fait comment pour les enseignants recrutés après ce projet ? Et puis, l’Etat est-il sûr qu’il ne supprimera pas l’indemnité de logement des bénéficiaires (quand on voit l’exemple actuel de tous les problèmes qu’ont les instituteurs qui occupent les logements d’astreinte) ?
– Et puis, qu’en est-il des 4 autres points de nos revendications ?
– Que de questions sans réponses…
Il apparait clairement que ce « projet immobilier » n’est pas une réponse pertinente ni crédible à nos 5 points revendications.
TOUS À LA GRÈVE LES 28, 29 ET 30 JANVIER 2019 DANS TOUTES LES ECOLES, TOUS LES COLLÈGES ET TOUS LES LYCÉES DE CÔTE D’IVOIRE !!!
Jean-Marc KOUASSI,
SGN du SYNEBCI,
Membre du Directoire de la COSEFCI».
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